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Rénovation énergétique et nouvelles règles DPE : comment anticiper la future interdiction de louer les passoires thermiques ?

Rénovation énergétique et nouvelles règles DPE : comment anticiper la future interdiction de louer les passoires thermiques ?

Comprendre les nouvelles règles du DPE et la notion de passoire thermique

Le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) occupe désormais une place centrale dans la stratégie patrimoniale des bailleurs. Depuis sa réforme, il n’est plus seulement informatif : il conditionne aussi la possibilité de louer un logement. Les “passoires thermiques” – logements classés F et G – sont progressivement visées par une interdiction de mise en location, avec un calendrier d’application qui s’étale sur plusieurs années.

Le DPE repose sur une double étiquette :

  • l’étiquette énergie, exprimée en kWh/m²/an ;
  • l’étiquette climat, exprimée en kg CO₂/m²/an.

Depuis 2021, le calcul est fiabilisé et opposable : le locataire peut contester un DPE manifestement erroné. Cette évolution renforce l’obligation pour les propriétaires de disposer d’un diagnostic à jour et réalisé par un professionnel certifié.

Calendrier de l’interdiction de louer les logements énergivores

Les nouvelles règles relatives aux “passoires thermiques” s’inscrivent dans une trajectoire progressive. Sans entrer dans des dates trop mouvantes au gré des ajustements réglementaires, il est établi que les logements les plus énergivores sont les premiers visés, puis progressivement les classes F et, à terme, une partie des logements classés E.

Les enjeux pour les bailleurs sont multiples :

  • risque d’interdiction de mise en location d’un logement très mal classé ;
  • gel possible de l’augmentation des loyers pour les biens classés F et G ;
  • obligation de travaux de rénovation énergétique pour rester dans le parc locatif privé ;
  • perte de valeur du bien en cas de non-conformité persistante.

Anticiper ces échéances est essentiel, car les artisans qualifiés en rénovation énergétique sont très sollicités et les délais de chantier s’allongent. Un propriétaire qui attend le dernier moment risque de faire face à une vacance locative non choisie.

Pourquoi la rénovation énergétique devient un enjeu patrimonial majeur

La simple conformité réglementaire n’est plus l’unique moteur. La performance énergétique influence désormais directement :

  • la valeur de revente du bien (décote sur les classes F et G) ;
  • l’attractivité locative (meilleure demande pour les logements classés A à D) ;
  • les charges supportées par les occupants (factures de chauffage, d’eau chaude, de climatisation) ;
  • la durée de vacance locative entre deux locataires.

Les acheteurs et locataires sont de plus en plus sensibles aux étiquettes du DPE. Un appartement bien situé mais mal isolé se louera plus difficilement, ou à un loyer moindre, qu’un logement performant en énergie, surtout dans les grandes agglomérations et les zones tendues.

Du point de vue patrimonial, engager une rénovation énergétique performante permet :

  • de sécuriser l’usage locatif du bien dans la durée ;
  • de limiter l’obsolescence technique et réglementaire ;
  • de se différencier sur un marché où les biens de qualité énergétique sont encore minoritaires.

Identifier si votre logement est une passoire thermique

La première étape consiste à analyser objectivement la situation de votre bien. Plusieurs éléments doivent attirer l’attention :

  • une étiquette DPE en classe F ou G ;
  • des factures d’énergie anormalement élevées pour la surface ;
  • une sensation d’inconfort thermique (froid l’hiver, surchauffe l’été) ;
  • des parois froides, des courants d’air, de la condensation ou des moisissures.

Pour disposer d’une vision précise, un audit énergétique peut compléter le DPE. Ce document plus détaillé propose des scénarios de travaux chiffrés, avec le gain énergétique estimé à chaque étape. Il reste particulièrement pertinent pour les maisons individuelles et les petits immeubles de rapport.

Un propriétaire bailleur a intérêt à croiser plusieurs sources : DPE actuel, avis d’un bureau d’études thermiques, retours des locataires sur le confort, relevés de consommation réelle d’énergie. Cette approche globale évite de se limiter à un simple changement de chaudière sans traiter l’enveloppe du bâtiment.

Les travaux prioritaires pour améliorer son DPE

Pour sortir d’une étiquette F ou G, l’enjeu est de combiner plusieurs types d’interventions. Les travaux de rénovation énergétique se regroupent généralement en trois grandes familles : isolation, systèmes de chauffage/ventilation, équipements complémentaires.

1. L’isolation thermique de l’enveloppe

L’isolation est le levier le plus structurant pour transformer durablement une passoire thermique. Les postes prioritaires sont :

  • isolation des combles et de la toiture, souvent responsables de 25 à 30 % des déperditions de chaleur ;
  • isolation des murs par l’intérieur ou par l’extérieur, avec un fort impact sur le confort et le DPE ;
  • isolation du plancher bas au-dessus d’un sous-sol non chauffé, d’un vide sanitaire ou d’un local non isolé.

Le choix d’isolants performants (laine minérale, fibre de bois, ouate de cellulose, polyuréthane, etc.) et d’une mise en œuvre soignée est déterminant. Une isolation mal réalisée (ponts thermiques, manque d’étanchéité à l’air) peut limiter les gains attendus au DPE.

2. Le remplacement du système de chauffage

Beaucoup de passoires thermiques sont encore équipées de chaudières anciennes, de convecteurs électriques énergivores ou d’appareils au fioul. La transition vers des systèmes plus sobres est un axe majeur de la rénovation énergétique :

  • pompe à chaleur air/eau ou air/air adaptée au climat et au bâti ;
  • chaudière gaz à condensation performante ;
  • chauffage bois via poêle ou chaudière biomasse, dans les maisons individuelles ;
  • radiateurs électriques à fluide caloporteur ou panneaux rayonnants, à condition d’avoir une isolation suffisante.

Le nouveau système de chauffage doit être dimensionné en fonction des besoins réels après travaux d’isolation, sous peine de surcoût et de surconsommation.

3. La ventilation et la gestion de l’air intérieur

Un logement étanchéifié sans ventilation adaptée risque de voir apparaître humidité et moisissures. Or ces pathologies pénalisent aussi le DPE et le confort. Les solutions les plus courantes sont :

  • ventilation mécanique contrôlée (VMC) simple flux ;
  • VMC hygroréglable, plus économe et adaptable aux besoins ;
  • VMC double flux, intéressante dans les rénovations lourdes bien maîtrisées.

Une bonne ventilation contribue à assainir le logement, réduire les déperditions parasites et optimiser le bon fonctionnement des systèmes de chauffage.

4. Les équipements complémentaires

Pour gagner encore quelques kWh au m² et améliorer l’étiquette du DPE, d’autres actions peuvent être envisagées :

  • remplacement des menuiseries simple vitrage par du double ou triple vitrage adapté ;
  • pose de volets isolants et de protections solaires ;
  • installation d’un chauffe-eau thermodynamique ou solaire ;
  • pilotage des radiateurs via un thermostat programmable ou des têtes thermostatiques connectées ;
  • réduction des ponts thermiques lors de toute intervention sur la structure.

Financer la rénovation énergétique de son bien locatif

La question financière reste centrale pour les propriétaires bailleurs. Les travaux nécessaires pour sortir d’une classe F ou G représentent un investissement significatif. Plusieurs leviers peuvent néanmoins en réduire le coût :

  • les aides nationales à la rénovation énergétique (MaPrimeRénov’, primes énergie, dispositifs pour les logements locatifs sous conditions) ;
  • les certificats d’économies d’énergie (CEE), versés sous forme de primes par certains fournisseurs d’énergie ;
  • l’éco-prêt à taux zéro, pour financer une partie des travaux sans intérêt ;
  • les aides des collectivités locales (région, département, intercommunalité, commune) pour les rénovations globales ;
  • les mécanismes d’amortissement et d’optimisation fiscale propres au statut de loueur (réel, LMNP, etc.).

Il est recommandé de se faire accompagner par un conseiller spécialisé (type France Rénov’ ou équivalent local) pour monter un plan de financement et vérifier l’éligibilité aux dispositifs. Les artisans RGE (Reconnu Garant de l’Environnement) sont souvent indispensables pour déclencher les subventions.

Stratégies pour anticiper et sécuriser son patrimoine locatif

Face aux futures interdictions de louer les passoires thermiques, chaque propriétaire doit définir une stratégie adaptée à son patrimoine et à sa situation financière. Plusieurs options coexistent :

  • engager une rénovation globale pour viser directement une classe D ou mieux, et sécuriser le bien sur le long terme ;
  • planifier une rénovation par étapes, en commençant par l’isolation et le chauffage, puis en complétant avec la menuiserie et les équipements ;
  • arbitrer une éventuelle vente du bien avant d’être contraint, en intégrant toutefois la décote liée à sa mauvaise performance énergétique ;
  • repenser le montage patrimonial (regroupement de lots, division, changement de destination en local professionnel ou autre, selon le contexte urbain et juridique).

La clé reste l’anticipation. Plus les décisions sont prises tôt, plus le propriétaire garde la main sur le calendrier des travaux, le choix des entreprises, le niveau de qualité énergétique visé et les sources de financement mobilisables.

La rénovation énergétique ne se résume plus à un simple geste écologique ; elle conditionne désormais la capacité à louer son bien, à en préserver la valeur et à répondre aux attentes croissantes des occupants en matière de confort et de maîtrise des charges. Pour les propriétaires bailleurs, s’emparer de ces nouvelles règles du DPE et anticiper la fin des passoires thermiques devient une nécessité stratégique.